Dans quel contexte les évolutions réglementaires concernant le document unique sont-elles intervenues ?
La Loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail, est venue transposer l'accord national interprofessionnel (ANI) conclu le 10 décembre 2020 par les partenaires sociaux, en vue de réformer la santé au travail. Parmi ses objectifs principaux, renforcer la prévention des risques professionnels au sein des entreprises et décloisonner la santé publique et la santé au travail.
Pris en application de cette Loi, un décret du 18 mars 2022 a apporté diverses précisions concernant le document unique d'évaluation des risques professionnels (DUERP). Ce document, qui répertorie l'ensemble des risques professionnels auxquels sont exposés les travailleurs, retranscrit les résultats de l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs mise en œuvre par l’employeur. Il doit en outre « assurer la traçabilité collective de ces expositions » tel que le précise désormais l’article L. 4121-3-1 du Code du travail.
Cette évaluation comporte un inventaire des risques identifiés dans chaque unité de travail de l'entreprise ou de l'établissement, y compris ceux liés aux ambiances thermiques.
La notion d'unité de travail
L’unité de travail doit être comprise au sens large afin de recouvrir les situations très diverses d’organisation du travail. Ce n’est pas nécessairement un poste de travail, une fonction, une activité, un processus mais bien une situation de travail dans laquelle des salariés, avec une ou des fonctions différentes et en charge d’activités différentes, sont exposés à un même risque.
A titre d’exemple, certains risques ou nuisances (bruit, vapeurs…) dépassent le périmètre du « poste de travail » et peuvent concerner d’autres salariés proches de celui-ci. Dans ce cas, l’unité de travail pourrait être la totalité de l’atelier de production considéré.
Le contenu du DUERP a-t-il évolué ?
Une distinction est désormais opérée en fonction de l’effectif des entreprises :
- pour les entreprises de plus de 50 salariés, les résultats de l’évaluation des risques doivent déboucher sur un programme annuel de prévention des risques professionnels et d'amélioration des conditions de travail (PAPRIPACT), mentionnant :
- la liste détaillée des mesures devant être prises au cours de l'année à venir, les mesures de prévention des effets de l'exposition aux risques professionnels ainsi que, pour chaque mesure, ses conditions d'exécution, des indicateurs de résultat et l'estimation de son coût ;
- les ressources de l'entreprise pouvant être mobilisées ;
- un calendrier de mise en œuvre.
- pour les entreprises de moins de 50 salariés, les résultats de l’évaluation doivent déboucher sur la définition d'actions de prévention des risques et de protection des salariés.
La mise à jour du DUERP se fait-elle toujours aux mêmes échéances ?
Mise à jour annuelle :
Avant le 31 mars 2022, toutes les entreprises quel que soit leur effectif, devaient mettre à jour le DUERP, a minima une fois par an. Les TPE de moins de 11 salariés sont désormais exonérées de cette mise à jour annuelle ; les entreprises de plus de 11 salariés conservent cette obligation.
Autres conditions de mise à jour :
En tout état de cause, quel que soit l’effectif de l’entreprise, le DUERP, ainsi que le PAPRIPACT ou la liste des actions de prévention, doivent être mis à jour :
- lors de toute décision d'aménagement important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail ;
- lorsqu'une information supplémentaire intéressant l'évaluation d'un risque est portée à la connaissance de l'employeur. Cette nouvelle formulation souligne le fait que, si l’employeur a connaissance de quelque information que ce soit, qui puisse avoir un impact sur l’évaluation d’un risque ou qui en créé un nouveau, le DUERP doit alors être mis à jour.
Chaque mise à jour doit alors déboucher sur des actions de prévention, si cela s’avère nécessaire.
Quelles sont les évolutions concernant l’archivage et la conservation du DUERP ?
L'employeur a désormais l’obligation de conserver le DUERP pour une durée minimale qui ne peut être inférieure à 40 ans, dans ses versions successives.
A cette fin, le DUERP et ses mises à jour doivent faire l'objet d'un dépôt dématérialisé sur un portail numérique déployé et administré par un organisme géré par les organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel. Cette obligation de dépôt dématérialisé du DUERP sera applicable à compter :
- du 1er juillet 2023, aux entreprises dont l'effectif est supérieur ou égal à 150 salariés ;
- de dates fixées par décret, en fonction des effectifs des entreprises, et au plus tard à compter du 1er juillet 2024 aux entreprises dont l'effectif est inférieur à 150 salariés.
Depuis le 31 mars 2022 et jusqu'à la mise en place du portail numérique, l'employeur doit conserver ses versions successives au sein de l'entreprise, sous la forme d'un document papier ou dématérialisé, selon sa propre organisation.
Qui sont les acteurs pouvant participer à l’élaboration et la mise à jour du DUERP ?
L’élaboration du DUERP résulte d’une approche collective de la prévention des risques professionnels, dans le cadre du dialogue social, même si le choix des mesures de prévention, du plan d’actions et de la démarche dans sa globalité relève, au final de l’initiative et de la responsabilité de l’employeur.
Parmi les nouveautés :
- Le Comité social et économique (CSE) et, le cas échéant, la commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT), peuvent apporter leur contribution à l’évaluation des risques professionnels dans l’entreprise.
Dans le cadre du dialogue social dans l’entreprise, le CSE doit désormais être consulté sur le DUERP et ses mises à jour.
La liste des actions de prévention et de protection prévues soit dans le PAPRIPACT (pour les entreprises de plus de 50 salariés) ou dans le plan d’actions (pour les PME) doit par ailleurs être présentée au CSE.
- Le service de prévention et de santé au travail (SPST) peut également participer à l’évaluation et la prévention des risques professionnels dans l’entreprise. Le DUERP doit d’ailleurs lui être transmis par l'employeur à chaque mise à jour.
- Le salarié compétent désigné par l'employeur pour s'occuper des activités de protection et de prévention des risques professionnels de l'entreprise peut également contribuer à l’évaluation des risques professionnels.
- Enfin, les branches professionnelles peuvent accompagner les entreprises dans l'élaboration et la mise à jour du DUERP.
Les modalités d’accès au DUERP ont-elles évolué ?
L’article R. 4121-4 du Code du travail précise la liste des personnes et instances qui doivent avoir accès au DUERP.
Tel que cela était prévu auparavant, le DUERP et ses versions antérieures sont tenus à la disposition :
- des membres de la délégation du personnel du CSE ;
- du service de prévention et de santé au travail ;
- des agents du système d'inspection du travail ;
- des agents des services de prévention des organismes de sécurité sociale ;
- des agents des organismes professionnels de santé, de sécurité et des conditions de travail constitués dans les branches d'activités présentant des risques particuliers ;
- des inspecteurs de la radioprotection en ce qui concerne les résultats des évaluations liées à l'exposition des travailleurs aux rayonnements ionisants, pour les installations et activités dont ils ont respectivement la charge.
Depuis le 31 mars 2022, les travailleurs mais également les anciens travailleurs, ont accès au DUERP, dans les versions en vigueur durant leur période d'activité dans l'entreprise.
Cette mise à disposition du DUERP et de ses versions antérieures doit être effective pendant une durée de 40 ans à compter de son élaboration.
Références juridiques
- Loi n° 2021-1018 du 2 août 2021 pour renforcer la prévention en santé au travail.
- Décret n° 2022-395 du 18 mars 2022 relatif au document unique d'évaluation des risques professionnels et aux modalités de prise en charge des formations en matière de santé, de sécurité et de conditions de travail par les opérateurs de compétences
- Articles L. 4121-3 et suivants du Code du travail